Le protectionnisme est une thématique qui revient régulièrement en période de crise et dont le potentiel candidat aux présidentielles 2022 Eric Zemmour semble s’être emparé. Selon Capital, l’éditorialiste défendrait à son tour l’idée d’un Buy european act, voire d’un Small business act, à l’échelle européenne. Un traité qui favoriserait notamment les entreprises et PME de l’Union, dans le cadre des marchés publics, afin de lutter contre la concurrence déloyale. Si le principe peut paraître séduisant à première vue, il est anticonstitutionnel et impossible à mettre en œuvre en pratique, en particulier au sein de l’U.E. dont les principes fondateurs reposent sur une logique de concurrence pure et parfaite.
La tentation du repli régional
À l’échelle locale, cette idée de favoriser les TPE – PME sur des commandes publiques n’est pas nouvelle mais elle s’est jusque-là toujours heurtée aux règles communautaires. Mais, au-delà de l’incompatibilité avec le fonctionnement des institutions, cette tentation du « localisme » remet en question le principe même de la compétitivité des entreprises. Elle serait même antiéconomique et contre-productive, comme le rappelait, dans La Gazette des Communes, Raphaël Apelbaum, avocat associé chez Lexcase avocats : « les PME n’ont pas besoin d’être « en dehors » de la mise concurrence de la commande publique. Bien au contraire, l’État doit permettre aux PME de pouvoir rivaliser avec leurs concurrents, et ce, dans un cadre d’égalité de traitement et non de favoritisme à leur égard. Il faut arrêter de vouloir mettre des béquilles pour apprendre à marcher. » Même son de cloche du côté d’Aurélien Tourret, Président de Caneva, pour qui ce concept de Small business act n’est bon pour personne. « Cela revient à créer des castes de marché qui, en plus d’être illégales, privent les acheteurs publics d’offres en adéquation avec leurs besoins réels, sans pour autant contribuer à faire progresser les petites entreprises sélectionnées. » Le dirigeant du cabinet expert en marchés publics accompagne notamment les PME à se doter d’outils, tels que le mémoire technique, pour être compétitives face à des concurrents plus rompus à l’exercice. Il ajoute : « si on veut une PME plus forte, il faut l’aider à grandir et non la surprotéger. Accompagnons donc ces entreprises et apprenons-leur à faire correctement, de manière à ce qu’elles soient armées pour aller se battre sur de nouveaux marchés. »
Ouvrir plutôt que restreindre
Par ailleurs, plutôt que de limiter certaines commandes publiques à une catégorie d’entreprises, nombreux sont ceux qui appellent à une plus grande accessibilité des appels d’offres. Comprendre : ne pas ajouter de barrières inutiles (tels que certains labels, un niveau de CA minimum, des assurances, etc.) et permettre à toutes les entreprises de répondre à la hauteur de ce qu’elles sont capables de produire. C’est d’ailleurs ce que font déjà plusieurs collectivités en ce sens. Pour illustration, la communauté d’agglomération Paris - Saclay annonçait la signature en mai 2021 d’une convention avec deux fédérations professionnelles du bâtiment (la FFB et la CAPEB). Une convention qui engage l'agglomération sur quatre volets : simplifier les marchés, communiquer sur les projets, former les entreprises à la réponse aux appels d'offres, et étudier des solutions innovantes pour faciliter l'accès des PME. Grégoire de Lasteyrie, Président de la communauté Paris-Saclay et maire de Palaiseau, indiquait en effet au journal Les Échos, vouloir revoir le format de certains appels d’offres. À titre d’exemple : « Si une commune lance un marché global pour réaliser des travaux dans dix écoles, seules les grandes entreprises pourront répondre. Si elle divise en dix lots, cela permet à beaucoup plus d'entreprises de candidater ». Des solutions concrètes, bien loin de la démagogie électorale.